Saint-Julien-en-Born / Mézos | 40

Depuis 2020, une association travaille en collaboration avec les agriculteurs locaux afin qu’ils deviennent techniquement autonomes et participent ainsi à changer le système de production, toujours plus gourmand en technologie et investissement. Et si le changement des pratiques agricoles passait par le changement des outils ?

S’installer en maraîchage, créer un élevage caprin… s’accompagne  d’investissements en matériel bien souvent inadapté à une production et une  taille d’exploitation  modérée. Un constat,  qui voici trois ans, a amené un étudiant  en Master “Gestion Territorial et Développement Local“  (Université Montaigne-Bordeaux) à mettre en place un projet au sein de l’association la Smalah* située à St Julien-en-Born. « Landais, j’ai  fréquenté d’abord le café de l’association, mais je connaissais son action sur le développement local. J’ai souhaité faire mon stage de deuxième année de master en alternance au sein de l’atelier de fabrication qui avait été créé récemment. Mais en 2020, le COVID a transformé mon stage pratique en une réflexion sur un projet, mené en toute liberté en collaboration avec  Vincent  Péchaud, fondateur de la Smalah,  sur la problématique des agriculteurs qui s’installent aujourd’hui, à savoir que leurs outils sont  coûteux, complexes et ne correspondent plus à l’agriculture prenant en compte la sobriété et  le contrôle de production qu’ils visent à mettre en place » raconte Benjamin Maugey.


« … Si on veut changer les pratiques, il faut changer les outils. »
En quelques mois, notre jeune diplômé va élaborer et donner vie au  projet “Ancrage“   dont l’objectif est de répondre aux besoins des  agriculteurs en matière d’outillage et à les accompagner à construire  les outils adaptés à leur ferme. «  Si on veut changer les pratiques, il faut changer les outils. Renforcer l'autonomie technique des fermes locales est un acte politique. Nos formations sur l’outillage et le bâti léger font partie de la réponse » précise notre interlocuteur imprégné encore de ses études en  sociologie et de son séjour au Canada, qui lui a ouvert des horizons sur la recherche transdisciplinaire.


Une vingtaine de fermes déjà accompagnées
“Ancrage“ atteint très vite son public et permet à Benjamin Maugey de créer son poste de salarié à 23 ans, dont une partie de son temps est aussi consacrée à la recherche de subventions. «  Depuis 2021, quinze fermes ont bénéficié de nos formations, cinq cette année.  Les outils qui sortent de  chez nous ont été fabriqués par les personnes qui ont suivi la formation sur cinq jours. On adapte au mieux l’outil de base selon la production, la surface à travailler… »


Au côté de ceux qui choisissent leur modèle et leurs pratiques
Si  le rapport de force avec le modèle de l’agriculture d’aujourd’hui n’est pas à l’avantage des petites structures,  des avancées sont cependant visibles au niveau local  : «  Il y a une prise  de conscience évidente, la chambre d’agriculture s’intéresse à nos formations, des filières locales s’organisent. On veut être de ceux qui participent à la construction d’un modèle dont les agriculteurs choisissent  leurs pratiques, que ce soit en maraîchage ou en petit élevage. »


Un club de recherche et développement citoyens au service de l’atelier
L’autre spécificité de l’association la Smalah a été d’accueillir des anciens salariés  autour d’un club nommé Brico 3000 : «  Soudeurs, artisans, artistes…  ont carte blanche pour produire des solutions répondant à des problématiques locales de mobilité, d’alimentation ou d’habitation sur le principe de la low-tech. Tous les lundis, l’atelier de  bricolage est ouvert. Les idées naissent autour de discussions, c’est notre club de recherche et développement citoyen.»


Une réponse adaptée aux besoins des micro-fermes
Un budget dédié, un atelier bien équipé, une belle énergie collective a permis de créer, voici quelque temps, un quad électrique avec batterie  à partir d’une carcasse initiale thermique  et d’un fauteuil roulant peu énergivore. « Nous aimerions poursuivre ces conceptions, car il y a des besoins sur les micro-fermes attenants aux petits déplacements ou  dans le domaine du tractage. D’autres innovations devraient voir le jour, comme le poêle de masse à alimentation bois qui servirait à chauffer des serres. C’est du bricolage d’experts qui s’appuie sur un   savoir-faire local. Nos méthodes s’inspirent de la méthode de L’Atelier Paysan** dont nous sommes aujourd’hui sociétaires.»


… « Et quelle est la prise en compte de l’écologie et du social dans votre  association ? »
« Depuis sa création en 2015, la Smalah a intégré dans son action l’aspect social et écologique. Cela fait partie de son logiciel. Les projets, qu’ils appartiennent au pôle culture ou au pôle production-formation de l’association, sont au service de la territorialité. Ils se construisent autour des besoins et avec les personnes qui vivent sur ce territoire. »


Conférences, ateliers … sur les techniques paysannes en 2024
Les projets d’Ancrage ne manquent pas au niveau des formations, de la stabilisation des prototypes amenant à leur production, mais aussi à travers un événement qui devrait se dérouler en février 2024 : « Nous travaillons à  créer un évènement avec conférences, ateliers sur les techniques paysannes, qui questionneraient celles-ci et qui mettraient en valeur l’outillage agricole, une sorte de foire agricole mais sans la présence de marques.»


* La Smalah accompagne et développe les projets d’un territoire autour de St Julien-en-Born (1300 habitants) à travers un pôle culture avec proposition d’activités culturelles  (Espace de Vie sociale) et un pôle production-formation. L’association  s’adresse aux personnes vivant sur ce territoire avec l’objectif de faire avec. Plus d’information : https://www.la-smalah.fr/
** L’Atelier Paysan :  coopérative  d’auto-construction  créée en 2009 accompagnant les agriculteurs et agricultrices dans la conception et la fabrication de machines et de bâtiments adaptés à une agroécologie paysanne, présente en France à travers 3 antennes.


Les trois coups ! Selon  Benjamin Maugey


> Coup  de chapeau : «  À l’élue régionale Laure Nayac, elle nous a encouragés à un moment de questionnement… Elle a cru à notre projet et nous a donné des contacts pour avancer.»


> Coup de main : « C’est le genre de  relations d’entraides mis en place  avec les agriculteurs-trices des Landes et qui constitue aujourd’hui une communauté. L’échange est de tous les moments par leur présence, leur  soutien, leur coup de main, ils nous aident et ainsi on peut  faire émerger des projets à partir de leurs réflexions…»



> Coup de projecteur : « Des lectures… Reprendre la terre aux machines,  un ouvrage  collectif  de l’Atelier Paysan qui identifie les verrous du système actuel et propose des solutions pour redonner au monde agricole, prolétarisé par le suréquipement, son indépendance économique. Également Abondance et liberté de Pierre Charbonnier,  une histoire environnementale des idées politiques conduite sous forme d’enquête, un ouvrage qui a été important dans mon cursus.»



En savoir plus  :   https://www.la-smalah.fr/


    

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REDACTION

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