Monbalen | 47

C’est l’histoire d’une « boîte à outils », à expérimentations multiples, à imaginer un autre mode de vie et de penser, à agir dès maintenant, qui a investi une maison fortifiée en   pleine campagne entre le Villeneuvois et l’Agenais. Dans ce lieu, des hommes et des femmes, jeunes et moins jeunes, y vivent, y travaillent, viennent en vacances, font aussi la fête avec la volonté d’y échanger. Un tiers-lieu de ressource culturelle, sociale et économique construit avec les autres d’ici et d’ailleurs.

À Monbalen, petit village situé à une demi-heure d’Agen,  la Maison Forte  construit depuis 2019  une culture de la transition, indispensable au changement, matière à espérer  comme le raconte Bruno Caillet,  un des co-fondateurs de l’association Maison Forte : «  Il n’y a pas de civilisation, sans culture, sans imaginaire, sans environnement. Notre organisation sociale se modifie avec le numérique, l’intelligence artificielle…Alors,  participons  à construire ce qui vient ! » Le discours se veut utopique et sans concession avec la théorie  de l’effondrement ; Il y a un Ici et maintenant dans cet espace,  quelque chose  à fabriquer bien plus mobilisateur et excitant. 

 

Un patrimoine qui demande à vivre… 

Démarrée avec un  collectif d’une dizaine de personnes du milieu de l’art, de la communication, de l’agro-écologie, de l’alimentation…l’association a choisi de s’installer dans une ancienne maison  fortifiée du XIIe  qui a donné son nom à l’association en 2019. « Le choix du lieu  a été fait par rapport à sa situation géographique  en Pays de Serres, un territoire coincé entre le Lot et la Garonne mais est aussi grâce à la rencontre de personnes sur ce territoire. Pour s’installer dans ce qui est en fait un château, Il a fallu bien sûr faire quelques travaux mais son avenir est associé avec les projets que nous y développons » précise Bruno Caillet.

Acquise en 2017, sous forme de SCI, la bâtisse, en effet,  mérite amplement le terme de château, avec sa tour de défense, anciennement  chapelle, la grande maison comprenant  2 niveaux de 300m2  prenant appui sur  des caves voûtées, les écuries, des bâtiments  agricoles, le séchoir à pruneau… Tout cela extrêmement protégé par un mur d’enceinte. Aux alentours, six hectares assurent  à ce lieu une grande paisibilité  pour l’association et ses locataires, qui ont conclu un bail éthique avec la SCI ; ce qui permet d’avoir un loyer s’adaptant à la situation économique de l’association et ses habitants.

 

Lieu d’expérimentation, où se testent de nouvelles idées 

Ici, les habitants permanents, sept à ce jour,  travaillent, s’interrogent sur les questions liées à l’environnement, l’alimentation, l’énergie, le travail… préparent les appels à projet pour résidence, les demandes de subventions, le programme de ce lieu ouvert de mars à octobre. 

Chaque année, un  appel à candidatures est ainsi ouvert aux artistes et chercheurs de toutes disciplines, dont les recherches croisent les questions qui animent La Maison forte.

Pour ces séjours, les résidents disposent d’un espace pour leur travail  sur une durée de deux à six semaines en général : « Une dizaine d’artistes, designers, chercheur/euse(s) par an expérimentent une idée liée à la transition. Dernièrement, une chercheuse travaillant sur les langues vernaculaires posait  la question -en quoi ces langues sont-elles constitutives du changement ? -  Les sujets sont posés,  échangés avec nous, mais au final il n’y a pas de rendu.  Par contre, chaque mois il y a une rencontre avec le public, les voisins, d’autres chercheurs ou artistes alentour… Il s’agit d’un échange sans enjeu. Nous sommes là pour leur donner  les moyens de faire, d'essayer, de rater si nécessaire»

L’an prochain, des étudiants de BTS devraient être conviés lors de ces rencontres mensuelles. 

 

… Mais aussi lieu de vacances 

Le tiers-lieu propose aussi  des séjours pour passer des vacances et découvrir ainsi une autre manière de vivre où l’on associe la découverte et le partage d’expérience. « Il peut y avoir des personnes qui souhaitent se  reposer dans un espace en pleine nature, qui s’interrogent sur leur façon de vivre, qui voudraient échanger, partager avec d’autres… C’est un lieu propice pour la rencontre, l’inspiration, et la bifurcation…»

 

Un laboratoire d’innovation sociale et culturelle 

Le territoire, ses habitants, sont aussi pour « ses chercheurs d’un demain » des pistes à explorer, dans le but d’inventer des coopérations pour travailler autrement. Le label « fabrique de territoire » obtenu en 2022, semble pleinement légitime. Ainsi, l’association élabore depuis deux ans une cartographie citoyenne qui s’appuie sur les paroles des autochtones, traitées ensuite par l’Intelligence Artificielle. Notre interlocuteur  précise l’ambition de ce travail :   «Nous avons la volonté, nous qui ne sommes pas d’ici -je le rappelle-  de recréer des rapports de convergence, de complémentarité pour mettre en place  un  développement  qui corresponde à l’identité de ce territoire  et réponde  –à l’envie des jeunes à vouloir partir, au manque de développement culturel et social…- Ces faiblesses du territoire on doit les mettre en vis-à-vis avec la qualité de vie et d’une culture de la diversité. À partir de ces données passées au filtre de l’Intelligence Artificielle, des particularités ont ainsi émergé. Elles nous donnent de la matière pour débattre, inventer des événements, des outils,  créer des connexions avec  des forces vives du territoire.» 

 

Le soutien des collectivités, des ministères… 

Les collectivités  locales, - de la commune, de la Communauté d’agglomération, du département, en passant par la région,   soutiennent l’association et son projet depuis le début, que ce soit dans l’accueil lors de l’acquisition du lieu, le label obtenu ou agrément, les subventions qui représentent aujourd’hui 70 % du modèle économique et qui - financent les projets portés par les salariés de l’association (soit l’équivalent temps plein de 7 personnes)

«  Notre métier consiste à aller chercher ces financements publics, à expliquer, à rendre compte de nos actions – que ce soit celles de faire revivre un lieu patrimonial, d’accueillir des jeunes scolaires, d’innover en matière sociale et culturelle, de recréer du lien sur le territoire avec les voisins et au-delà les habitants d’ici- Le montant de ces financement montre la détermination des élus à accompagner de nouvelles voies comme la nôtre.»

La transmission pour demain 

Les projets au sein de l’incubateur d’idées innovantes ne manquent pas, mais si pour notre interlocuteur, fabriquer, c’est bien, le  faire savoir, le transmettre c’est encore mieux et c’est dans cet objectif qu’en mars 2024 devrait ouvrir une école ÊTRE (Ecole de la Transition Ecologique) qui propose des formations pour les jeunes de 16 à 25 ans, pratiques et manuelles autour des métiers verts et verdissants. Elle rejoindrait alors le réseau ÊTRE qui comprend aujourd’hui une quarantaine d’écoles en France. 

Et des festivités aussi au programme…

Tout l’été, une fois par mois le jeudi, Maison Forte propose des spectacles avec  une guinguette,  pour déguster des plats qui donnent une large  place au végétal, local et bio accompagnés de vin bio ou naturel) mais aussi avec l’idée de régaler les visiteurs à travers l’échange et les conversations que l’ambiance suscite. 

 

 

Les trois coups ! Selon  Bruno Caillet 


Coup de chapeau : « Aux personnes de la DRAC  qui nous ont dit dès le départ : “on y croit“ et plus largement ceux et celles qui sont dans les services du département et de la région, et qui défendent des propos comme les nôtres, sans eux comme traducteur de ce que l’on produit, on n’avancerait pas.»

Coup de main : « Toute personne de bonne volonté, sans être angélique  à quelque chose à tenter avec nous et peut nous rejoindre…»

Coup de projecteur : «  Sur les philosophes du vivant qui ont amené d’autres types de réflexion, de questionnement. Quand on lit  « la piste animale » de Baptiste  Morizot , on en ressort avec une force nouvelle, on regarde les choses différemment.» 

 

 Maison forte : https://la-maison-forte.com

 

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REDACTION

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