Bayonne 64

Comment habiter là où l’on travaille, où l’on vit lorsque le marché immobilier se situe dans une zone tendue, la demande étant supérieure à l’offre ? La solution s’appuie ici sur le droit, le principe des communs et aussi une façon de penser autrement le patrimoine, la transmission… Et tout cela dans le but d’une reprise de pouvoir local et de liens sociaux plus riches.

Ni propriétaire, ni locataire mais habitant, le postulat de base est posé par  Etxalde  qui souhaite apporter une solution à ceux et celles qui  veulent habiter  dans une zone où il est difficile de se loger et plus particulièrement ici dans le Pays basque. Pour le co-créateur de l’association, aujourd’hui  SCIC,  Beñat Etchebest, il est important de rappeler   ce que signifie habiter : « Plus que de parler de logement, la notion d’habiter revêt un caractère plus actif et responsable. C’est être d’ici, c’est connaître ses voisins, c’est échanger avec eux, c’est créer une vie que l’on organise ensemble et cela change tout dans notre mode de vie et de relations. Nous souhaitons aller vers ce modèle oublié ou perdu.»

À partir de la gouvernance des communs…
Par sa vie professionnelle dont une partie a été effectuée dans l’immobilier,  ses recherches sur les communs, et notamment  en s’appuyant sur celles menées par Elinor Ostrom, -économiste et politologue américaine, prix Nobel en 2009 avec Olivier Williamson-  qui avait  démontré l’efficacité de la gestion des  biens communs et ce qu’ils favorisaient, mais aussi sa culture basque,  Beñat Etchebest a initié avec des entrepreneurs , enseignants, acteurs du logement social…  une nouvelle façon de repenser l’ici et le maintenant pour les habitants  : « Nous avons oublié qu’autrefois  nous avions une organisation très versée sur la gouvernance des communs, et notamment dans le Pays Basque. On était de tel village, on appartenait à une maison et non l’inverse. Et lorsqu’il s’agissait de faire une route, un pont… c’est chaque maison qui décidait. En devenant propriétaire individuel, on a perdu de notre pouvoir de décision local en quelque sorte, celui que  la communauté s’était donnée.»

Le pouvoir de décider en dehors du marché
La proposition Etxalde n’est pas une proposition de défiscalisation,  mais un modèle s’affranchissant de certaines règles du marché foncier spéculatif   tout en restant dans la légalité bien évidemment : « Avec Etxalde nous avons imaginé, à partir de  l’usufruit une manière de pouvoir habiter un lieu avec la liberté de pouvoir le vendre et le louer. Dans cet objectif Etxalde acquière le bien en propriété collective par l’intermédiaire de la SCIC,  et va disposer de  la nue-propriété. Celui qui y habite disposera de l’usufruit qu’il pourra transmettre. Dans un commun, la population définit sa gouvernance, ici on parle de règles foncières.»
La propriété collective va alors  permettre de conserver les biens acquis - immeubles, fermes, appartements…-  dans le « patrimoine commun » de la société basque, en évitant qu’ils soient transformés, vendus et revendus avec chaque fois une plus-value liée à la spéculation immobilière. Une façon de sortir ses biens immobiliers du marché, de mettre en avant la valeur de l’usage et non son prix  comme le précise notre interlocuteur.

Décaler nos façons de penser…
Avec l’objectif de répondre aux problèmes du coût du logement, de donner accès  à  tous  au droit de « propriété partagée »  par le biais de l’usufruit, de refuser que la propriété soit réservée à quelques-uns, notre interlocuteur nous invite pour cela  à redonner du pouvoir à la  vie locale, à sortir de l’individualisme, à donner plus de force politique à chacun : «  Pour cela, bien sûr, il faut décaler notre façon de penser, sortir de l’individualisme, de l’homme providence, de la  compétition permanente, se dire que l’on peut décider en famille du bien et ce n’est pas le marché avec sa plus-value qui décidera… il faut croire à  l’intelligence collective. Si l’on regarde bien autour de soi, ceux qui sont élus, nos représentants,   sont le plus souvent propriétaires… Alors donnons aussi  à tous et toutes la possibilité  grâce à la propriété partagée  de participer aux prises de décisions. »

L’intérêt de la proposition à travers  les réalisations, les explications
Fondée en 2007, Etxalde association devient une Société Coopérative d’Intérêt Collectif de type Société Anonyme à capital variable en 2018, ce qui va permettre la première acquisition de deux immeubles à Mauléon.
A ce jour, des communes basques sont également intéressées par le montage proposé par Etxalde «  Nous souhaitons faire connaître le modèle des communs qui bien sûr nécessite chaque jour à être expliqué. Nous sommes là pour rendre nos propos concrets par nos réalisations, mais aussi en allant auprès des personnes intéressées afin de démontrer l’intérêt et la richesse de la proposition. Mais je suis confiant sur notre capacité d’adaptation à un nouveau modèle.»


Les trois coups ! Selon Beñat Etchebest



> Coup de chapeau : «  A ce qui fait une communauté au niveau local, des hommes et des femmes, qui ont  l’envie de vivre et de partager un territoire, tisser des liens, réaliser  des projets…»


> Coup de main : « Notre projet étant collectif, On reçoit des coups de main de pas mal de monde, plus précisément  lorsque des personnes donnent de leur temps comme nos experts-comptables. »



> Coup de projecteur : « J’invite les lecteurs à aller  découvrir  le travail d’Elinor Ostrom. Allons revisiter l’organisation paysanne au Moyen Âge…  Les communs ont été privatisés en 1793 et ont pratiquement disparu et le pouvoir des individus avec. Réfléchissons d’où vient le marché financier, la spéculation foncière, comment il a dépossédé notre pouvoir d’agir … ? »


En savoir plus :  Etxalde : https://www.etxalde.eu/
    


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REDACTION

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