Créon | 33

Comment renouer avec le vivant, tisser ou retisser des liens avec la « nature », retrouver les liens originels de la vie… ?  L’ enquête menée par une journaliste à travers une immersion personnelle et intime, mêlée aux savoirs et à la connaissance des personnes rencontrées permet d’apporter des réponses. Un livre militant pour ressentir, comprendre et démarré une histoire qui pourrait être la « nôtre » demain. Interview…

ITVB : Journaliste spécialisée dans  l’économie collaborative, de l’écologie et de l’innovation sociale , vous êtes aussi auteure. Dans votre dernier ouvrage « L’enquête du sauvage », paru en  mars dernier,  vous allez plus  loin que l’investigation journalistique, c’est une vraie immersion que vous faites dans la « nature », le lecteur vous suit, découvre votre caractère, votre famille…  rencontre aussi bien votre intimité que des gens de savoirs
Anne-Sophie Novel : c’était nouveau pour moi et cela est parti de la demande de l’éditeur la Salamandre en partenariat avec le mouvement des Colibris.  Cela relève du gonzo journalisme, où l’auteure n’hésite pas à se mettre en scène et ouvre alors la boîte de la fabrique informationnelle… l’écriture se fait  à la première personne et on rend compte de sa transformation personnelle au cours de l’expérience.  Grandir avec la nature pendant un an, vaste sujet, c’était le pari. Moi qui étais plus urbaine que campagne, plus  attirée par mer et pas très proche en fait de la nature…Je me suis  lancée dans l’expérience et j’ai rendu compte de cette démarche.

« " L’ enquête » comprend   8 étapes qui vont de l’écoute à la transmission ; la première est simple,  vous allez prendre le temps d’écouter les oiseaux… ?
A-S N : Cette plongée (tiens, un terme marin !! NDLR) je l’ai fait pendant le confinement, un moment où l’on ne peut pas circuler comme l’on veut, donc cela démarre chez  moi.  J’habite depuis quelques années seulement en campagne (à 25 km  de Bordeaux ). j’ai pris e temps de l’écoute et de l’observation aussi, seule et parfois avec mes enfants mais c’est aussi une découverte de tous les sens qui se fait.  J’avais été très attentive aux  ouvrages de Vinciane Despret, philosophe, qui a étudié notamment ce que serait un territoire du point de vue des animaux. Son observation nous invite à entendre les sons de la terre, à entrer dans le « phonocène », à commencer à penser la langue des choses, à penser les choses comme dotées d’une certaine forme de langage.

Dans cette immersion, vous pratiquez un aller-retour très réussi  entre ressentis, connaissances,  savoirs de chercheurs, d’enseignants,  de spécialistes  ou de personne expérimentées, soit plus d’une centaine de rencontres,  et souvent vous  mettez en avant des femmes, ce qui est à noter…
A-S N : Oui c’est vrai , j’ai été interpellée par le travail de   l’historienne Estelle Zhong Mengual,  qui est urbaine  et qui a exploré notamment ce que l’on perçoit du vivant dans les œuvres d’art, et  va rechercher les travaux des femmes dans le monde. Elle rappelle comment des femmes  américaines exclues de la recherche  vont, depuis chez elles, observer la nature  et apporter une approche différente de celles  des hommes.  Cette contrainte, due au confinement, je l’ai aussi intégrée à mon travail, je l’ai pris comme une opportunité à développer chez moi l’observation, à comprendre l’interdépendance du vivant et à expliquer ce  que cela change en moi quand vous voyez quelque chose,  l’exigence de trouver les bons mots aussi.

L’objectif de ce livre est de donner à chacun des solutions,  des moyens d’action … à travers une démarche à portée de mains ?
A-S N : Oui, c’est à la portée de tout le monde. Retisser  ce  lien c’est la seule solution, pas besoin d’être un écologiste convaincu pour agir.  Au-delà du cheminement personnel, il y a un message politique montrant qu’il y a des choses à faire à notre niveau personnel.   À la fin de l’ouvrage, de nombreuses pistes sont à explorer qui peuvent commencer par la lecture, la proposition de lieux où l’on peut s’informer, des associations auprès desquelles on peut s’engager…

On ne recommence pas deux fois la même expérience…   Comment allez vous continuer à  la faire vivre ? Et cela vous a t-il changé ?
A-S N :  D’abord,   sur le plan personnel, je ne regarde plus de la même  façon le vivant qui m’entoure, et cela devient aussi une préoccupation récurrente. Le GIEC  rappelle  qu’il faut s’appuyer sur la nature pour trouver des solutions.
Je vais à travers mon métier continuer à transmettre, informer… et si pour l’heure je suis en colère contre l’inertie des élus, il faut  faire confiance aussi à  ceux et celles qui travaillent sur le vivant,  à ceux qui se mobilisent partout, aux citoyens qui luttent contre la mise en place d’entrepôts, tous ces grands projets inutiles  car les solutions existent pour préserver la nature, le vivant,  le soigner, le défendre … et le beau cadeau , c’est que les chercheurs observent la résilience du vivant très vite si on lui  redonne sa place. »

Un livre à mettre en toutes les mains,  citoyens  des villes  et des campagnes. La  démarche et le style de l’écriture donnent envie au lecteur d’en savoir plus et  de s’immiscer lui aussi dans cette aventure afin de trouver son chemin dans le « grand dehors ».


Accès à l’ouvrage…

Éditions La Salamandre : https://boutique.salamandre.org/l-enquete-sauvage-pourquoi-et-comment-renouer-avec-le-vivant.pdt-1245/

Mouvement des Colibris : https://www.colibris-laboutique.org/accueil/786-l-enquete-sauvage

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REDACTION

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