Arudy 64
« Les règles du mikado »… Une métaphore pour parler d’accueil, d’hospitalité et de fraternité. Le hasard d’une rencontre va changer la vie de celui qui va accueillir l’étrangère et transformer celle qui va grandir à ses côtés quelque temps. Chacun va aider l’autre, le sauver. Le fossé des différences est ici balayé, l’envie de donner et celle d’apprendre vont construire une belle relation où les secrets donneront une force à ce récit plein d’humanité. Un roman proposé par la librairie la Curieuse.
Coup de cœur pour « les règles du mikado » d’Erri de Luca -2024-
« C’est un auteur que j’aime et j’ai choisi ce livre car il peut être lu par plein de monde… Il a pas mal d’entrées qui permettent de s’en emparer de manières différentes. Ce qui m’a plu, c’est la rencontre inattendue entre un vieil homme et une jeune femme, ce duo est rare en littérature, L’originalité de cette rencontre invite à s’interroger, comprendre, vivre… l’accueil, l’hospitalité, l’écoute, le respect … tout ce qui fait la richesse de la rencontre humaine » raconte Marianne Lassus de la librairie la Curieuse
Une rencontre inattendue
«L’histoire met en scène deux personnages -un vieil horloger, un peu mystérieux qui aime bien bivouaquer en montagne près de la frontière avec la Slovénie, dans l’Italie du Nord, la patrie de l’auteur… et une jeune tzigane de quinze ans, qui va devoir un jour franchir la frontière pour fuir un mariage forcé et se réfugier dans la tente du vieil homme et lui demander de l’abriter. Cela peut se lire comme un polar car il y a une chute, la métaphore avec le mikado à une résonance qui pourrait s’apparenter à un ouvrage de développement personnel et puis c’est aussi un livre avec un message politique même s’il est moins engagé que le précédent « Impossible » »
Les règles du mikado, vont infuser tout le livre
«C’est un roman d’initiation où les deux personnages vont cheminer ensemble ce qui va faire la richesse de cette relation. On retrouve la thématique du secret, de la montagne et le goût pour la nature de l’auteur. L’accueil, l’hospitalité, la tolérance, la fraternité… traversent en permanence le roman. Les règles du mikado, vont infuser tout le livre et vont amener le côté philosophique au récit »
Différents registres d’écritures dans un style très épuré
« La première partie est très dialoguée et la seconde partie est épistolaire lorsqu’ils se sépareront. Dans un style très épuré, cette variation est agréable dans la lecture et elle va permettre une chute étonnante à partir des révélations concernant les deux personnages. »
Alors qu’il est dans la minutie et la précision… Elle, est dans le toucher
« Le vieil horloger, le riche vagabond comme l’appelle la jeune tzigane est issu d’un milieu social très modeste et a fait sa fortune dans l’horlogerie suisse en vendant des montres de luxe. Son goût pour la nature, la montagne, sa volonté de s’extraire du monde le rend assez mystérieux. Alors qu’il est dans la minutie et la précision, elle est dans le toucher, le contact. Chacun va aller l’un vers l’autre avec ses différences, lui par son hospitalité, sa tolérance… elle, par son écoute, son respect. Pour cette jeune analphabète dans la fuite, qui va s’émanciper de son peuple, l’envie d’apprendre auprès de ce vieil horloger l’amène à de nombreuses découvertes et vers une nouvelle vie. »
Des valeurs transculturelles à partager
« L’accueil, l’hospitalité des étrangers, la tolérance – thématiques importantes chez Erri de Luca – montrent que les êtres humains ne sont pas des êtres assignés à une identité. Et, cet humanisme, on peut le trouver à travers des rencontres inattendues. Ce qui m’a intéressée c’est comment des valeurs d’humanisme, de fraternité, de tolérance… peuvent être partagées par toutes les religions, les peuples, les personnes… car Erri de Luca, d’extrême gauche, athée, certes imprimé par la religion, fait ici la démonstration que quelque soit son parcours de vie, toutes ces valeurs sont transculturelles.»
« Aimons-nous les uns les autres » : Et pourquoi pas ?
« La relation entre les deux est très belle. Chacun en fait va protéger l’autre, le sauver … alors que l’on pourrait penser que seul le vieil horloger est en capacité de venir en aide à la tzigane.
Avec un certain lyrisme et optimisme peut-être, je dirais que ce livre nous dit - Aimons nous les uns les autres - C’est pas mal, à un moment où on est dans la peur de l’autre, le renfermement, voir que l’inattendu bouscule, amène de telles transformations… c’est essentiel à mes yeux et ça fait du bien de lire cela. J’ai envie de proposer ce livre à tout le monde»
On plante le décor de la librairie La Curieuse
À Arudy, commune de 2000 habitants, située dans la vallée d’Ossau, la librairie troquet a ouvert depuis quatre ans sous la houlette de Marianne Lassus, professeur d’histoire auparavant, mais aujourd’hui véritable couteau suisse au service de la vie culturelle locale. Elle réaffirme avec enthousiasme son choix d’avoir créé ce lieu qui porte un nom qui lui va bien, la Curieuse : « Je suis toujours très heureuse de mon rôle et de mon insertion dans la vie culturelle locale. Une librairie fait sens dans cette vallée. On me le dit presque tous les jours même si les réalités économiques –comptabilité, gestion… - que j’avais mises de côté me rattrapent et me demandent de m’ y atteler plus aujourd’hui.»
Rencontres littéraires, en sciences humaines, cercle de lectures
Ici, les rencontres d’auteurs animées par notre libraire sont au programme deux fois par mois et font le plein : « à la surprise des auteurs qui viennent de Paris, ils s’étonnent du monde. L’idée n’est pas de proposer une dédicace sèche mais de proposer une rencontre. J’ai préparé au préalable des questions, j’interviewe l’auteur, le public peut participer… parfois il y a des variantes, la lecture musicale. L’auteur vient, lit son texte et est accompagné d’un musicien. Les auteurs le proposent de plus en plus et cela permet de toucher un autre public. »
À côté de ces rencontres littéraires, la libraire souhaite développer des rencontres en sciences humaines pour aborder des questions plus politiques et sociales, intéressant un public plus jeune.
Depuis quelques mois, le cercle de lectures a fait son entrée : « Je réponds à une demande de mes clients, la première a eu lieu en mars. On devrait trouver un rythme bimestriel pour échanger sur des livres que je propose, sur un thème dont le dernier était sur l’Europe ».
Être libraire aujourd’hui, qu’est-ce que cela veut dire ? Quelle mission on se donne ?
« C’est un rôle social et politique, même si c’est très ambitieux ce que je dis, avec toujours l’idée de la transmission, en relation avec mon métier de prof que j’exerçais avant. J’aime transmettre des idées, des coups de cœur… l’essentiel étant le lien avec la clientèle que je tutoie pour la plupart. On ouvre la porte pour me dire bonjour, boire un café… La librairie est avant tout un lieu de vie et d’échanges où l’on parle »
Actualité
Le 4 juillet, Trans Humez à Bielle : Ce jour-là la librairie se déplace à 18 h au café culturel Tichodrome à Bielle. Trans Humez, un événement proposant des expositions, des ateliers avec des propositions de lecture.
Le 6 juillet, entre histoire et mémoire : Rencontre avec Jeannette Ananos pour son ouvrage « Sur les sentiers du refus (1939-1945) » à 11 h à la Curieuse. Un ouvrage de témoignages recueillis pour la plupart en Barétous. Cette rencontre est réalisée dans le cadre de la journée portant sur le thème « immigrés, les camps hier et aujourd’hui » ; un événement en partenariat avec la CIMADE (association de soutien et de solidarité qui accompagnent les personnes étrangères) et Terre et mémoire(s) et de Luttes.
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